Un point sur le projet “Bersot”, pour la commémoration de la guerre 1914-1918

Autour du soldat Bersot

Aborder le point de vue des protagonistes d’une affaire de fusillé pour l’exemple, en créant une histoire interactive.

Prolonger le travail de mémoire en simulant le procès en réhabilitation du même soldat, quatre ans après la fin de la guerre.

Une trace indélébile dans le patrimoine local

Janvier et février 1915. Le 60ème régiment d’infanterie de Besançon est mis à mal par l’ennemi dans le secteur de Soissons. La prise de la côte 132 vers le 16 janvier est un cuisant échec, la responsabilité du commandement est engagée. Début février, le colonel Auroux arrive à la tête de la brigade et fait preuve d’autoritarisme. Né à Authoison (Haute Saône), Lucien Bersot, suite à une banale incartade liée à son refus de porter le pantalon d’un soldat mort, est emprisonné et bientôt condamné suite à la tenue d’un conseil de guerre exceptionnel. Fin de son histoire.

Mais violation flagrante de l’article 24 du Code de justice militaire : Auroux utilise un article illégitime (Bersot ne peut être exécuté pour des faits de désobéissance en l’absence de l’ennemi) et fait office de juge et parti lors du conseil. En 1922, un procès en réhabilitation permet à sa veuve et à sa fille d’être enfin reconnues comme victimes de la guerre, et à son honneur d’être sauf.

Se mettre dans la peau des protagonistes, et dans leur esprit

Si l’histoire de Bersot est une tragédie, pourquoi ne pas réfléchir aux protagonistes de sa mésaventure comme des personnages de théâtre ? En compulsant ce que disent les archives de cette affaire et le quotidien des poilus et des épouses restées à l’arrière, il est possible de s’interroger sur les choix opérés par tous ceux qui ont pris part à cette escalade funeste.

C’est le projet de deux classes de 3ème du collège Raymond Gueux de Gy (Haute Saône), soit une cinquantaine d’élèves, pendant les cours de français et d’histoire géographie.

La première partie du projet vise à créer des visual novels, de courts jeux vidéos où des personnages exposent leurs histoires sous plusieurs formes narratives, parfois agrémentées de choix à faire par le lecteur. Le tout avec d’illustrations issus de documentations libres de droit et du travail d’un artiste professionnel, Arnaud Hascoët. Chaque personnage explique sa version de l’histoire et livre le dilemme, le regret, ou le remord éventuel qu’il a vécus.

La seconde partie vise à reprendre une partie des personnages de 1915 pour les faire intervenir dans une recréation fictive du procès de réhabilitation de 1922. Elle se fera sous une forme théâtrale où les rôles clés sont tenus par les élèves.

Des objectifs multiples, autour d’un impératif d’immersion

Le travail autour des sources vise à cibler les faits historiques qui sont susceptibles d’être réutilisés dans les histoires interactives. Les zones d’ombre absentes de ces sources sont comblées avec un peu d’imagination.

Quand la narration est suffisamment avancée, les élèves passent à la partie technique. Le logiciel libre Renpy est utilisé afin de programmer la visual novel. Cela demande la manipulation du fichier script, requérant des lignes de commandes spécifiques et exigeant une grande rigueur dans les lignes de codes.

Les possibilités de Renpy étant étendues, un travail collaboratif efficace permet aux différentes équipes (de 2 à 4 personnes) d’ajouter plus ou moins de fonctionnalités à l’histoire finale.

Enfin, la recréation du procès demande une écriture de rôles conforme aux objectifs et aux connaissances de chaque protagoniste, ainsi qu’une aisance à l’oral afin de faire passer les arguments qui décideront, dans cette simulation, de la réhabilitation effective du soldat Bersot.

Ces deux temps d’ « Autour de Bersot » ont été conçus pour étudier la construction de la mémoire d’un fait historique : de sa très chaude actualité à ses prolongements lointains qui soldent enfin ses dérives. C’est aussi un moyen pour appréhender le règlement de la guerre elle-même par le long processus de réhabilitation des « lâches » et des « traîtres », étape judiciaire cruciale pour apaiser les souffrances des civils. Ce procès n’est pas sans rappeler les enjeux de celui de Zola en 1898 en pleine Affaire Dreyfus : la dichotomie entre raison d’Etat et honneur de l’Armée face aux principes supérieurs de la justice et des droits de l’homme.

Dans la rigueur de l’hiver 1915

Actuellement (début février 1915), le projet en est à la phase de fin de programmation sur Renpy. Outre les finitions, un travail avec l’illustrateur permettra de fixer les visages des personnages qui y révèlent leurs états d’âme.

Vers la fin avril, le projet reprendra ensuite pour aborder l’étape de la simulation du procès de 1922.

 

Lien vers le site de la Mission du Centenaire

http://centenaire.org/fr/espace-pedagogique/ressources-pedagogiques/exemples-de-projets-scolaires/deuxieme-degre/des-0?fbclid=IwAR3CjZODvzIigcoHKEJwruK2faTTzKYCEa6rN6V7eAmNNoheoM1FcBGyDSA

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